lundi 29 janvier 2024

Papy, tu me racontes la place des palmistes ?

 

Papy ! Tu me racontes la place des palmistes?



Alors là, ma petite Erin, tu me demandes une chose bien difficile, mais je vais quand même essayer pour te faire plaisir, pardon d’avance si je raconte des bêtises, ce seront mes bêtises à moi, tu n’es pas obligé de les raconter à tout le monde !

J’ai découvert la place des palmiste le premier matin de mon arrivée pour la première fois en Guyane en octobre 1973, nous avions atterri à Rochambeau vers une heure ou deux du matin, à bord d’une caravelle, je crois, un avion, qui avait fait toute la côte depuis la Martinique !
À cette époque, il n’y avait un vol direct de Paris vers la Guyane qu’une ou deux fois par semaine, les autres jours, c’était ce qu’on appelait « le laitier » une sorte d’avion omnibus qui se posait un peu partout, Trinidad, à Georgetown, à Paramaribo, résultat, 2h du matin, personne ne nous attendait évidemment à l’aéroport, j’étais avec Nicole et petite fille, myriam qui venait juste de faire ses premiers pas.

J’en reviens à la place des palmiste, parce que dès le début de la matinée de notre premier jour en terre de Guyane, nous avons évidemment traversé cette place pour aller au siège de la direction des actions sanitaires et sociales de l’époque, bâtiment en bois qui est juste derrière la bibliothèque actuellement, à côté de l’école maternelle Josephine Horth. Je suis arrivé dans le bureau du directeur avec Nicole, portant dans ses bras la petite Myriam complètement épuisée qui a commencé à se trouver mieux grâce au climatiseur dont ce brave homme bénéficiait, on venait lui demander quel travail j’allais avoir à faire en Guyane! 
Alors tu peux déjà noter que ce bâtiment administratif est toujours là!
Après si tu veux bien, on va faire le tour ensemble en allant d’abord vers le fond de la place des palmiste, là où il y avait à cette époque le grand hôpital Jean Martial. Bon il y a 50 ans, j’ai eu la chance d’y aller ensuite très souvent, d'y manger, de temps en temps avec les jeunes médecins, qui étaient logés à l’internat, situé à droite dans la cour, une fois passée le porche. J’ai été aussi très souvent dans le service de dermatologie du docteur Pradinaud, et dans celui du Dr Ho-A-Chuck, le premier médecin est aujourd’hui en retraite, et je crois que le deuxième qui a plus de 86 ans, travaille encore un peu. les bâtiments sont toujours là ! 

Je ne vais pas te parler de tout, parce que on serait encore là demain matin à bavarder, mais si on continue à faire le tour, on arrive devant une école que ta maman et ta grand-mère connaissent très bien.
Après, en marchant toujours, quand on a presque fait le tour on arrive évidemment au mythique "Café des palmistes". Tout cela existait il y a 50 ans, tout cela existe encore aujourd’hui.
Mais surtout, je voudrais te parler de ce qu’il y a au milieu de cette place , la statue de ce petit bonhomme au ventre bien rond, Félix Eboué, pour moi, le personnage le plus important de toute la Guyane.
Un homme qui est né à Cayenne, rue Christophe Colomb, en 1884, d’une famille originaire de Roura . Un homme extraordinaire qui, par son courage et son intelligence, a su gravir tous les degrés de responsabilité publique aux Antilles et en Afrique. La nation française lui a rendu le plus grand des honneurs en recueillant sa dépouille au Panthéon, à Paris, auprès des personnages les plus importants de l’histoire de France.

J’admire beaucoup son beau discours à la jeunesse à l’occasion d’une remise de prix le premier juillet 1937, dans un lycée de Guadeloupe: 

«  Jouer le jeu, c'est être désintéressé.
Jouer le jeu, c'est piétiner les préjugés, tous les préjugés et apprendre à baser l'échelle des valeurs sur les critères de l'esprit.
Jouer le jeu, c'est mépriser les intrigues et les cabales, ne jamais abdiquer, malgré les clameurs ou menaces, c'est poursuivre la route droite qu'on s'est tracée.
Jouer le jeu, c'est savoir tirer son chapeau devant les authentiques valeurs qui s'imposent et faire un pied-de-nez aux pédants et aux attardés.
Jouer le jeu, c'est aimer les hommes, tous les hommes et se dire qu'ils sont tous bâtis sur une commune mesure humaine qui est faite de qualités et de défauts.
Jouer le jeu, c'est mériter notre libération et signifier la sainteté, la pureté de notre esprit… »


Tu es un peu jeune pour comprendre ces belles phrases mais garde les dans un petit coin de ta tête, ça peut toujours servir.

Henri Dumoulin, ton papy de coeur.