dimanche 26 novembre 2023

23 juin 1925, la colère

 


Couéron le 23 juin 1925, la colère!


Mon cher Raymond


Je viens de recevoir à l'instant ta lettre de dimanche, je t'assure que je l'ai attendue avec impatience, et si tu avais attendu la mienne impatiemment il y a quelques jours je crois que tu m'as rendu la pareille, mais je t'assure que cette lettre tant désirée ne m'a pas du tout fait plaisir.

Qu'est-ce que c'est que ce médecin et ce sanatorium, en voilà une manière de faire attention aux malades, si tu te figures que c'est de cette façon que ta fièvre va baisser, vraiment je me demande si tu as bien fait de partir et si tu vas obtenir de l'amélioration dans cette boutique là ; je suis vraiment furieuse ce soir, dépenser tant d'argent, être séparé de toi, me donner tant de peine pour que le commerce marche ici et obtenir un résultat pareil, j'en suis navré. J'aurais aussi bien fait de t'envoyer chez Tante Bretécher ou dans une autre maison particulière.




Tu me dis aussi:" ce matin j'ai eu un peu froid et j'ai encore eu 38°3 ce soir", pourquoi es-tu resté à avoir froid, c'est-t-il qu'il te manque des effets pour te couvrir ou c'est-t-il de la négligence de ta part? Quand tu auras rattrapé une autre attaque de pleurésie et qu'il faudra les 15 jours ou trois semaines près de toi, comment ferais-je en ce moment là et dans quel état cela te mettra-t-il. Tu ne me dis pas aussi si tu as "augmenté" ( poids) ; je t'assure que ce soir je tremble de mécontentement, dans trois semaines je serai près de toi et si ça marche comme ça, que ta température n'a pas commencé à baisser, je ne sais si je te laisserai et surtout ne me cache rien.

J'étais très inquiet aujourd'hui car voilà deux nuits que je suis continuellement avec toi. Sois sûre que ce soir tu me fait beaucoup de peine. Pourquoi ne resterais-tu pas au lit, que tu ne te lèverais qu'à  heure des repas, puisque votre médecin est assez, ,je dirais, si j'osais, cochon pour si mal vous soigner pour l'argent qu'on lui donne. Une belle affaire que le fils qui vient tous les huit jours soit gentil si les autres jours vous êtes soignés comme des gens bien portants. 

Marie et moi qui nous disions : « une bonne année ça passera, surtout que nous sommes tranquilles sur son sort, que nous le savons soigné comme il doit l'être ». Une jolie manière d'être tranquille, si depuis que tu étais parti j'étais peut-être tranquille à ton sujet je crois que maintenant il ne sera pas de même. Plus que jamais je te recommande de faire attention.

Pour ce qui est de la petite Monmonde, sois absolument tranquille, elle est on ne peut plus gentille, gaie comme un pinson, il faut que l'on chante à longueur de jours : dodo poulette, Quand le Jésus allait à l'école, J'engagerai ma promesse au baptême...tout ce qu'elle connaît, je crois bien que j'ai jamais tant chanté de ma vie, elle nous épuise avec son chant, heureusement que Madame Porchay, qui vient souvent par là, me remplace.

Nous avons commencé aujourd'hui à la mettre à table, elle a mangé toute seule à midi, toujours dans sa chaise longue, nous la poussons en partie sous la table. Il n'y a qu'un seul ennui, c'est que pour ne pas se voir, elle ne demande pas à faire pipi et fait tout sous elle, ce soir elle a même fait caca : après l'avoir nettoyé, je l'ai tenu par trois fois, comme elle ne voulait pas faire, je l'ai rassisse, le temps de lire ta lettre c'était fait, je t'assure que déjà mécontente de tes nouvelles je me suis fâché tout rouge elle a été battue, je ne sais si cela va lui faire du bien, mais c'est très ennuyeux qu'elle agisse de la sorte car l'urine pourrait attaquer le plâtre. A part cela elle est on ne peut plus mignonne et ne nous donne pas de peine . Elle n'est nullement fatiguée, donc soit tranquille sur son sort, et sur le nôtre aussi car la petite Marie est très heureuse et moi je ne me porte pas mal du tout ; le tien est le plus inquiétant en ce moment-ci.


Ce matin j'ai vu Monsieur Bardy qui m'a dit que nous pourrons prendre d'autres bois au pèlerin à la fin de la semaine et qu'il pourrait nous en fournir de celles de l'autre côté de l'eau ainsi que tu le disais, 500 et même 600 si tu le veux. Pour les perches nous allons être sans doute obligé de les prendre au Pélerin car à la Sarthe, il a été fait une erreur et les perches qui sont sur le voyage sont pour des pêcheurs et celles destinées pour nous sont parties d'un autre côté, mais nous pourrons prendre ce qu'il nous faudra chez lui. Pour le paiement il m'a dit qu'il passerait puisque il m'était difficile de me déranger. 




 Buzenval le 26 juin 1925

Ma chère Célestine

J'ai reçu ta lettre hier matin, je me doutais bien que les renseignements que tu m'avais demandé, et que je t'ai fourni sur ma lettre du dimanche n'allait pas te faire trop de plaisir, mais je ne croyais pas à ce point et ce qu'il y a d'un peu raide c'est que tu as l'air de m'en faire porter les conséquences. Tu me dis par exemple à un endroit : « Sois sûr que ce soir tu me fait beaucoup de peine ». Je me demande un peu si c'est de ma faute que nous ayons un docteur négligent qui ne s'occupe pas de nous comme il le faudrait. Vraiment je crois que tu exagères un peu toi aussi, et je me demande si j'ai bien fait de te dire cela dans cette maudite lettre. Tu me demandes aussi pourquoi je serais resté avoir froid dans ma chambre, s'il me manque des effets pour me couvrir ou si c'est de la négligence de ma part. Et bien si je suis resté avoir froid bien souvent dans ma chambre, c'est que je ne veux pas te priver du plaisir de recevoir ma lettre, car je crois t'avoir dit, que lorsque je monte à ma chambre le soir, j'avais les pieds gelés. Tant qu'aux effets, je dirais qu'en ce moment j'ai deux paires de chaussettes aux pieds et que j'ai repris mon tricot sous ma chemise. Tant qu'à la négligence de ma part, je crois que je suis assez grand et pas encore assez "sans souci" pour attraper de quoi faire une pleurésie.

Tu me demandes aussi pourquoi je ne resterais pas au lit pour ne me lever qu'à  l'heure des repas. Le matin c'est impossible car si je me couchais après déjeuner, vers 9h ou 9h30, il faudrait que je me relève pour que la femme de chambre fasse la chambre, et je pense que ça ne vaudrait  guère  la peine que je me recouche à 10h30 pour me relever une heure après. L'après-midi je me couche à 1h pour ne me ne me lever qu'à 7 heures moins le quart.

Je ne t'ais pas dit que j'avais augmenté, c'est que malheureusement j'ai perdu 1 kg. Il ne faut pas attribuer cela au manque de nourriture car je mange bien, je crois plutôt que c'est la grande chaleur qui m'a beaucoup fatigué au début, et puis aussi ,la fièvre trop élevé en ce moment-là.

J'attends ce matin la visite du docteur, je n'ai plus que deux piqûres à faire, sans doute il y aura-t-il un arrêt dans huit jours pour recommencer ensuite. J'avais ces deux jours comme température 38°1, le matin 36°7 le soir, ce matin 36°7.


Tu as vu Monsieur Bardy qui a confirmé ce que je t'avais dit pour le bois du pèlerin, je pense que tu pourras le prendre car l'année dernière nous en avions 600 et nous en avons manqué de bonne heure . Qu'est-ce que c'est que celui de la Sarthe, est-il bon? Mais si les perches qui étaient dans le wagon n'étaient pas pour nous, il ne faudra pas en payer le transport. Tu en demanderas la déduction  à Monsieur Bardy lorsqu'il viendra se faire payer. Tu me diras ainsi que je te l'ai dit, ce que coûte le transport dans ce wagon.

Je crois en effet que les roulages ne manquent pas, mais s'il fait à Couéron le même temps qu'ici le charbon devrait marcher. Ce matin ce matin le docteur était en peine s'il ne devait pas rallumer le calorifère, il y avait seulement 13° à l'intérieur du Sana.

Tu feras sans doute ton inventaire à la fin du mois. 

Ce qui me fait plaisir c'est que Raymonde ne vous donne pas trop de peine. Seulement ce qui est embêtant, c'est qu'elle ne veut pas demander pour faire ses besoins. Il faut, je crois, essayer à la forcer, car ça ferait du vilain si le plâtre venait à se défaire. Je ne t'en dis pas davantage pour ce matin, à dimanche maintenant.

Pardonne-moi si ma lettre est un peu rude, je n'étais pas content moi non plus. Ton mari qui malgré tout t'aime  bien et voudrais bien être près de toi.

Raymond

3 commentaires:

  1. Merci RIRI. Je suis perdu. Je n' ai pas en tête les liens de parenté ! ... Ma fôte ! ...

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  2. Tu sais là ce sont toujours les mêmes personnes : mon grand père maternel : Raymond, ma grand mère maternelle Célestine, ma mère Marie ( le petit bout de zan qui avait 18 mois) et sa grande sœur Raymonde ( qui avait 3 ans et mourra de pneumonie à 4 ans, un an après la mort de son père Raymond)

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  3. Ah, il y a aussi évidemment notre tante Marie Legendre qui deviendra Minier, la soeur de grand-mère !

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