samedi 25 novembre 2023

Célestine et Raymond, l'opération de Monmonde.







Couéron, le samedi soir 20 juin 1925





Cher petit loulou.

Deux mots simplement ce soir, pour te donner surtout des nouvelles de ta petite fille ; elle est aussi mignonne que possible.

28 mai 1925, diagnostic du radiologue de Nantes inscrit au dos de la radio photographie en ma possession.

 L'opération s'est faite à 9h30 hier matin et à 10h nous sommes retournés la chercher sur la table d'opération, elle n'était pas encore trop réveillée et  petit à petit la raison lui est revenue, mais dans la journée il n'a pas fallu que sa tante Marie la quitte, elle ne voulait voir qu'elle : Couches toi à côté de Monmonde, Tante, et chante dodo poulette…! 

Monsieur Humbert est venu nous chercher à 3h30, elle n'était pas fatiguée du tout et causait très bien ! la nuit n'a pas été bonne et heureusement que l'on a pu se remplacer car on peut l'appeler une nuit blanche, dès qu'elle perdait connaissance, elle sautait et cela la réveillait et puis elle avait aussi un peu de fièvre et se sentant la tête chaude elle voulait changer de place, oh sûrement deux fois toutes les cinq minutes de 10 heures à minuit, de toute la nuit elle a dormi deux sommes de trois quarts d'heure.

Et ce matin elle s'est assoupi de 6 heures à 8h, de toute la journée elle a été mignonne, les petits de chez nous et Lulu sont venus, elle a fait une partie avec eux, je lui avais acheté pour un francs 25 une espèce de petit boite à musique, elle est heureuse comme tout avec cela, elle dit : donne la musique à Monmonde et puis tu vas chanter : Ave Maria! ( Peut-être l'ave maria de Lourdes que maman a fredonné avec moi la veille de sa mort...) 

Il faut souvent chanter pour lui faire plaisir. Le seul ennui c'est qu'elle ne veut pas demander à faire son pipi car elle ne veut pas se lever, pas se voir comme ça, elle ne veut même pas qu'on regarde ; heureusement que pour le pipi elle est installée de façon à ne pas se mouiller mais c'est cependant ennuyeux.

Nous aurions pu la mettre dans une chaise longue dès aujourd'hui, mais elle ne veut pas qu'on la bouge de son lit, nous essaierons demain; enfin ne t'inquiète pas cela va aussi bien que possible et le médecin nous assure pour ainsi dire la guérison, mais il était temps d'agir.


*Cliquez sur le lien ci dessous, Raymonde n'avait une luxation congénitale qu'a droite, sa radio qui est chez moi, montre bien du côté droit une ascension anormale du fémur et surtout d'apparition d'un embryon de tête fémorale sous la forme d'une petite boule bien visible à gauche.

Luxation congénitale de hanche



Je n'ai pas vu mon petit bout de Zan depuis hier matin, mais il paraît qu'elle se plaît bien et Lucie et Marcel sont heureux de l'avoir, comme je crois te l'avoir dit, ils sont à Couéron  pour quelques semaines.




Je te rendrai les comptes du commerce demain, l'argent aurait rentré un peu plus ces jours-ci, et les roulages ne manquent pas, les chevaux ne restent jamais à l'écurie. Le foin du pré des tourterelles est rentré dans le grenier hier, il y en avait trois charrettes, je t'en parlerai plus longuement dans la prochaine lettre.

Ne t'inquiètes donc pas outre mesure mon petit lapin car pour t'écrire je ne fais pas toujours comme je veux, il y a des fois où je suis bien fatiguée et que je vais me coucher et maintenant il y aura peut-être des jours où Monmonde m'empêchera de faire comme je voudrais

Ta maudite fièvre, quand donc va-t-elle baisser, j'ai hâte de savoir ce qu'a dit le médecin, tu ne m'as pas dit si c'était un docteur de valeur. Monsieur Desclaut nous disait l'autre jour : « Vous êtes bien exigeante de vouloir qu'il n'ait plus de fièvre, hier le docteur Moulinas avec qui l'on parlait de cette maladie là disait que l'on avait très bien fait de faire lit à part car j'aurais attrapé la maladie en peu de temps, alors je lui disais : « quand pourrons-nous retourner ensemble? Quand on ne trouvera plus de bacilles dans ses crachats car en ce moment-là ce sera signe que cela se cicatrise » alors tu vois que c'est très bon signe de ne pas avoir beaucoup de bacilles dans tes crachats, il n'y a donc que cette maudite fièvre, je regrette beaucoup de n'avoir pas consulté Monsieur Moulinas pour toi, il me plaît beaucoup, il est très franc. On aura beaucoup de choses à se dire quand j'irai, mais il faudra ne plus avoir de fièvre d'ici là. 

Je termine mon bavardage sans le relire car il est 10h30 et je cours la porter à la poste. 

Mille baisers mon amour.

Cicine



Buzenval 24 juin 1925

Ma chère petite femme

J'avais l'intention d'écrire dès hier soir, mais je suis monté à ma chambre avec les pieds gelés et je me suis mis au lit aussitôt et même je te dirais que j'ai gardé mon caleçon ( long) pour me réchauffer plus vite, tu penses qu'avec nos fenêtres grandes ouvertes, c'est comme si nous couchions en dehors. Ce matin même, je n'ai pas trop chaud aux mains, et mon écriture s'en ressent. 

C'est un temps vraiment bizarre, il y a huit jours ont grillait sur place, maintenant on gèle .

J'ai reçu tes deux lettres, la première lundi soir et l'autre hier matin. Ce qui m'étonne c'est que tu n'ait pas reçu dimanche celle que je t'ai écrit vendredi, c'est à se demander où elles passent.


En somme l'opération de Raymonde s'est très bien passée, tant mieux il faut souhaiter maintenant que le plâtre ne se démolisse pas avant le temps. C'est bien embêtant qu'elle ne veuille pas demander pour faire ses besoins, et il ne faudrait peut-être pas trop lui céder pour cela, car une fois qu'elle aura pris le pli, ce sera difficile de lui faire passer. Ce qui est bon c'est qu'elle est chante comme auparavant, cela prouve que ça n'agit pas sur son caractère.

Ce qui me fait de la peine, ma chère Cécile, c'est que tu te couches beaucoup trop tard, cela fait plusieurs fois que tu te mets à m'écrire à 22h30, sans compter les autres soirs que je ne sais pas à quelle heure tu te couches ; en plus tu es assez matinale puisque tu te lèves à 6h, cela te fait donc 7h de sommeil et n'est pas assez. 

Prends garde, mon petit loup, tu as pourtant eu deux exemples dans Clémentine et dans moi. Il me semble pourtant qu'à vous deux, Marie et toi, vous devriez être débarrassé de longues heures le soir. Je t'avais déjà recommandé cela avant de partir, et tu m'avais promis de faire attention, j'espère que tu prends toujours Madame Porchet. Allons, fais-moi plaisir et dis-moi qu'à l'avenir tu dois être prête à te coucher à 10h au plus tard



Monsieur Bardy t'a envoyé le wagon de la Sarthe, il n'a pas mis beaucoup de perches si il n'en a  mis que neuf, je lui en avais commandé un cent. Il faudra que tu me dises dès que le wagon sera arrivé, si les fagots sont bons,s'ils valent ceux du pèlerin, et le prix du transport. Tu me diras aussi ce que c'est que les perches. Si les fagots sont bons, on pourrait peut-être lui en commander un autre wagon avec le reste des perches si elles sont belles, car je me souviens, l'année dernière nous avons eu dans les 600 fagots, et nous en avons manqué de bonne heure.

Tu peux continuer, si tu veux l'office du Mans, on pourra peut-être en avoir encore besoin. Tant qu'à Lepage, le buraliste, il m'a payé le corbillard, mais je ne me souviens pas, et je ne crois pas qu'ils ait payé le fumier. C'était je crois 21 Fr., comme je ne suis pas sûr, il vaut mieux ne pas réclamer.

Ici pas grand-chose de nouveau, la température s'est de beaucoup refroidie et je ne sais trop où me fourrer, tout à l'heure je vais quand même descendre à la cure et m'y envelopper dans mes couvertures. Je continue toujours à faire ma cure l'après-midi dans mon lit, je crois que je vais pouvoir réussir peu à peu à faire tomber cette maudite fièvre, hier soir j'avais 38°. Évidemment ce n'est pas encore le rêve, mais je crois qu'il vaut mieux qu'elle baisse lentement, elle remontera je crois moins vite.


Ce matin je vais payer ma troisième quinzaine, je n'aurai bien sûr pas assez pour payer la prochaine qui sera écoulé le 8 juillet. Je devrai par conséquent payer le 9 mai, mais comme tu viendras le 12, j'espère qu'ils attendront bien jusque-là.

Je ne t'en met pas davantage pour aujourd'hui, tu vois cette écriture !

Allons  ma petite Cicine, au revoir pour aujourd'hui, et je te dis aussi à bientôt car je compte les jours tu sais !

Que cette lettre te porte tout mon amour. Ton Raymond qui t'aimes lui aussi à la folie! 

Raymond.




Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire