mercredi 28 février 2024

Les amis de Saumur




À plusieurs reprises, dans leur correspondance, Célestine ou Raymond, citent les noms de Monsieur et Madame Baranger :
« De vrais amis, ceux là … Ils sont très gentils, ce sont de vrais amis,… , des étrangers comme eux qui viennent spontanément nous offrir de nous aider, ce sont de vrais amis… Baranger m’a offert de m’envoyer de la lecture… »
En fait Baranger et Gourby ont fait le régiment ensemble à Angers, ils ont sympathisé et sont restés amis. A cette époque il semble que l’ami Baranger travaillait chez Amiot ( veuve Amiot, champagnes..un gros négociant en vins)

J’ai retrouvé trois feuilles précieusement conservées par grand mère. Vous comprendrez pourquoi en les lisant: 
un courrier du 27 mai 2025 de Madame Baranger adressé à Célestine, un courrier du même jour de Monsieur Baranger adressé à Raymond et un courrier du 31 décembre 1926, adressé à Célestine qui vivait alors à Basse Indre , venant de Madame Baranger.


Saumur, 27 mai 1925,
Mon cher Raymond
Nous avions bien reçu ta lettre et appris avec peine la période des épreuves que vous venez de traverser et les sacrifices que vous avez encore à faire. Aujourd’hui j’ai tenu à te serrer la main à ton passage à Saumur et je regrette que nous ayons eu si peu de temps à passer ensemble. Je t’ai promis de t’écrire souvent et de commencer dès demain. Mais après t’avoir quitté je me suis aperçu que j’avais oublié de te demander ta nouvelle adresse et comme il faut que ma lettre passe par Couëron. Je viens dès ce soir bavarder avec toi.
Oui c’est vrai nous avons été longtemps sans correspondre, et si vous êtes excusable, par suite des inquiétudes et ennuies de toute sorte que vous avez eu, je m’excuse pour ma part d’un peu de négligence. Je dis un peu car avec toutes les réunions catholiques organisées depuis le début de l’année, les séances de patronage et la période électorale qui est venu, se greffer là-dessus, tu verras mon cher ami, qu’il me restait peu de temps libre. Sois persuadé que nous ne vous oublions pas et que très souvent nous parlions de vous pour constater que depuis longtemps, nous n’avions pas correspondu.
Tout cela, j’aurais voulu te le dire aujourd’hui, et bien autre chose encore, mais l’heure du départ avait sonné !
Tu pars pour quatre mois m’as-tu dit, de suite j’ai compris combien avait dû être dur pour toi cette séparation de ta famille et de tes affaires. Je me rappelle pour ma part, mes départs d’autrefois, et ce n’était alors que pour huit ou quinze jours, trois semaines au plus. La séparation avait toujours été toujours pénible. J’ai aéré aussi avec le courage de te résigner à ton sort, tant mieux, car de cette façon, tu seras plus sûre d’arriver à la guérison complète : un bon moral et ton effet le point principal.
Nous avons un cousin qui s’est trouvé dans la même situation, que toi et qui, après un séjour dans un sanatorium, et quelques petites précautions se portenaujourd’hui à merveille. C’est donc dire que tu nous reviendras de là-bas complètement retapé et que nous fêterons tous ensemble ton retour dans notre région.
La charge de Madame gourby est certes pénible ; sans nul doute, elle se tirera d’affaire grâce aux dispositions que tu as prise avant ton départ. D’un autre côté, les conseils ne lui manqueront certainement pas de la part de tes amis de Couëron. Quoi qu’il en soit, nous sommes à votre entière disposition pour tout ce que vous pourriez désirer pour vous aider et n’ai pas peur de frapper à la porte. Entre vieux camarades, on ne se refuse rien. Une question plus délicate que j’aborde, franchement, certain que vous ne vous en froisserez pas, c’est que, si avec tous ces ennuis et frais divers, vous aviez besoin à moment donné de quelques fonds, ne vous gênez pas avec nous, là encore, nous ferons tout ce qui nous sera possible, vous n’en doutez pas!
Mon cher ami, je te quitte en te souhaitant un bon courage et une prompte guérison. soigne-toi énergiquement, ce que tu manqueras, pas de faire avec ton vive désir de revenir bientôt auprès de ta femme et de tes deux petites filles.
Je te serre bien cordialement la main.
P Baranger.

Chère madame,
C’est avec peine que j’ai lu votre lettre nous faisant part de tout vos ennuis et inquiétudes. Le bon Dieu vous éprouve mais ayez confiance en sa bonté. Il vous donnera le courage nécessaire pour traverser ce dûr moment. J.avais l’intention d’aller à la gare avec mon mari et Pierrot pour voir, Monsieur Gourby , mais le temps était si mauvais que j’ai dû à grand regret renoncer à ce projet. Mon mari y est donc allé seul. Malheureusement, le train avait du retard et n’est resté en gare que quelques instants, c’est donc un bien court moment que nos maris ont pu passer ensemble. Mon mari était cependant content d’avoir pu assurer son ami de toute sa vieille et fidèle amitié.
C’est pour vous deux un dur sacrifice d’être séparé pendant plusieurs mois, certes, mais puisque la santé de votre mari en dépend, il vous faut bien y être résigné.
Ainsi que mon mari l’écrit à Monsieur Gourby, nous avons un cousin qui s’est trouvé dans la même situation à la suite d’une grippe infectieuse et d’un empoisonnement par un acide violent, il avait semble-t-il une lésion assez importante, après repos, complet et des soins énergiques . Pendant plusieurs mois, il a été guéri, et maintenant tout en prenant des précautions, il se porte bien, il a quatre enfants et dirige un gros commerce de bois,, charbon, fourrage et est ingénieur électricien à la tête d’une équipe de 10 à 12 ouvriers. Vous voyez que vous pouvez avoir bon espoir. Je suis persuadé que ce séjour dans ce sanatorium fera beaucoup de bien à votre cher malade.
lorsque vous irez le voir, prévenez-nous de votre passage à Saumur et je ferai tout mon possible pour vous voir en gare.
Je comprends votre inquiétude également pour votre petite Raymonde mais cependant c’est peut-être moins grave que vous le pensez car une enfant est facile à soigner, soignée à temps et énergiquement, nul doute que votre petite fille marchera. Normalement on dit en effet beaucoup de bien du sana de Penbron et j’ai connu une fillette qui atteinte de coxalgie en est revenue complètement guérie et marche maintenant comme vous et moi.
Monsieur Gourby dit que vous allez continuer à faire marcher le commerce, j’espère pour vous que de ce côté tout ira aussi bien que possible.
En tout cas, si pour un ennui ou une difficulté quelconque vous avez besoin de nous, n’hésitez pas à nous écrire, vous savez que vous pouvez compter sur notre amitié.
Ici, nous nous portons bien, notre pierrot est un fort bébé, à six mois, il pèse plus de 16 livres et demi, il pousse comme un champignon et a fait quelques rages de dents (il en a une depuis quelques jours, ses colères ne sont pas très fréquentes).
Mon mari a oublié de demander l’adresse de Monsieur Gourby , il vous envoie sa lettre en vous priant de la lui envoyer.
Bon courage, chère madame, ne vous découragez pas. Le bon Dieu vous aidera, je prierai pour vous. Pierrot envoie ses bons baisers à vos deux petites filles.
Je vous envoie mon meilleur souvenir.
MH Baranger



Saumur le 31/12/26
Chère madame,
Je ne veux pas tarder à vous offrir au nom de ma petite famille, nos meilleurs et bien sincères vœux pour 1927. Nous vous souhaitons le courage qui vous est nécessaire pour mener à bien la tâche lourde, pour vous seul, pauvre amie, d’élever vos deux petites filles, puis la réussite dans votre commerce, une bonne santé dont vous avez tant besoin. Il y a quelques jours que nous n’avons eu de vos nouvelles. Au moment de votre dernière lettre, vous nous disiez être souffrante. J’espère que vous ne l’avez pas été trop gravement et que vous n’avez pas été obligée de vous arrêter, ce que vous craigniez.
Et vos petites filles comment se portent-t-elles ? Aussi, bien que possible, je pense, Raymonde doit être déjà toute grande. Comme elles doivent être pour vous, une grande et bien douce compagnie, ces deux petites, surtout en ces jours de fête qui sont des jours de réunion de famille, et oú, la pensée de votre cher disparu doit se faire encore plus vivante à votre esprit ?

Pauvre monsieur Gourby ! Nous pensons souvent à vous et à lui, je vous assure, et je n’oublierai jamais les quelques bons moments que nous avons passés ensemble. Lorsque nous étions allés vous voir à Couëron, et lorsque vous êtes venus à Saumur. Mon mari, qui avait pu l’apprécier au régiment l’aimait beaucoup, et du premier coup ma sympathie lui avait été acquise. Aussi, chère madame, soyez assurée que nous vous continuons cette bonne amitié, et que nous sommes prêts à vous rendre les services dont vous pourriez avoir besoin. Notre petite vie est toujours bien calme, mon mari à la maison Amiot, et moi dans notre petit logement puisque nous n’avons encore rien trouvé de plus grand à notre convenance. Notre Pierrot est un petit diablotin qui a déjà deux ans passés. Il n’est pas méchant, mais turbulent possible. En ce moment il s’amuse énormément avec les jouets nouveaux que le petit Jésus lui a apporté. Il jouit d’une parfaite santé et pousse à merveille.

A Saumur il y a actuellement comme un peu partout, je crois une épidémie de grippe, ce n’est pas étonnant d’ailleurs, avec la mauvaise saison que nous avons eu à subir jusqu’à ce jour, Elle nous a épargné et j’espère bien que nous nous en passerons. J’étais assez souffrante du foie cet été. Je suis un régime assez strict et en ce moment je me porte bien. Mon mari lui est toujours solide et vaillant.

Je vous renouvelle, chère madame, nos meilleurs vœux pour vous et vos deux petites filles que Pierrot embrasse bien tendrement.
Mon mari se joint à moi, et nous vous envoyons chère madame, l’assurance de nos meilleurs sentiments
MH Baranger
Avec nos meilleurs vœux pour vous, vos deux petites filles et votre famille
P Baranger

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