8 juillet Notre dame de la Salette

 

Couëron  le 8 juillet 1925

Notre dame de la Salette 

Mon cher Raymond

Je ne vais pas bavarder longtemps avec toi ce soir car quand tu recevras cette lettre, il n'y aura plus que deux jours avant que je suis près de toi, je partirai donc dès samedi matin, j'irai dans la matinée voir la société des combustibles et Monsieur David comme cela je te porterai des nouvelles toutes fraîches sur les cours du charbon et tu m'indiquera la marche à suivre. Sur le marché nous pourrons toujours prendre toute la gayette et encore nous n'aurons guère d'avance, car ces jours-ci le commerce reprend un peu. L'argent rentre davantage, cela me fait plaisir. Notre nouveau cheval ( Sultane) marche à merveille, elle roule un tombereau de sable sans se gêner, si tu voyais qu'elle belle bête aussi, mais elle souffle vite, Elle n'est pas trop en état non plus et a besoin de graisse. Henri disait ce soir qu'elle était aussi brutale, que Marquise, a reculé et qu'elle essaye toujours de mordre. Je ne crois pas t'avoir dit son âge : elle a sept ans, mais cette fois il paraît que c'est bien sept ans car d'après Babin, Fleurette en avait bien huit ou neuf. Tu peux je crois être content d'elle. Demain elle va à la Martinière car Henri va aller avec Bageot, il lui en faut là-bas   deux charretées. Je vais être obligé de commencer à marquer ce que je voulais te demander car il va y avoir beaucoup à dire sur toutes les choses du commerce.

Je serai bien content de recevoir une lettre de toi avant mon départ pour savoir ce que devient ta température, tu penses combien cela va être ennuyeux si le docteur t'ordonne le lit pendant que je vais être avec toi. Nous ne serons pas si libres. C'est drôle qu'elle ne bouge pas du tout, tu ne me parles pas dans tes dernières lettres de ce qu'elle donne au juste ( la fièvre..).

 *. Il y a quelques jours j'ai envoyé une" journée de pain" à l'école apostolique de la Salette pour obtenir de Notre-Dame de la Salette une amélioration de ta santé et comme nous pouvions choisir un jour où on prierait plus spécialement pour la grâce qu'on voulait obtenir, j'ai choisi le 15 juillet anniversaire de notre mariage, j'ai demandé aussi un peu d'eau de la Salette, si je l'ai avant de partir je te l'apporterai, sinon on te l'enverra après et tu la boiras. Prie donc tous les jours notre-Dame de la Salette.

Pour moi je me porte toujours bien, cela n'empêche pas que lundi que nous avons été à Vertou je m'en suis revenu bien lassée, mais il n'y paraît plus rien. Monmonde se porte aussi à merveille mais est toujours sale, Marie est très mignonne aussi, beaucoup avisée. Allons je vais terminer, je te parlerai plus longuement de tout cela dimanche, si seulement la joie d'être ensemble te ferait baisser cette température, il n'y aurait rien de drôle.

À bientôt de te serrer sur mon cœur, je voudrais bien y être rendue. Je te couvre de baisers, petit Raymonde mille fois aimé

Célestine

* Sur le site de l'actuel lycée Livet de Nantes.